« Croissance souterraine », c’est le nom d’une entreprise londonienne de pointe qui a racheté les abris anti-aériens de la seconde guerre mondiale et investi dans l’édification d’une ferme souterraine. Croissance des plantes aux LED (light-emitting diodes ; diodes électroluminescentes), en continu (8°C de température constante assurée en hiver), en hydroponie (hors sol avec solution nutritive) et avec circuit fermé de l’eau. Double bénéfice : pas de pesticides et pas de transports. Autrement dit, toutes les vertus écologiques désirables…
Il ne faut pas se fier aux apparences ; quand les aléas climatiques auront ravagé toutes les campagnes aux alentours de la capitale, les ingénieux entrepreneurs pensent gagner des fortunes. A un détail près, pourtant : Londres est en zone inondable du fait de la déstabilisation climatique et les souterrains seront évidemment les premières zones submergées. C’est le propre de la rationalité technique et financière : elle circonscrit étroitement son champ d’application à l’effet recherché et ne veut rien voir au delà. Dans les années 1920 Winston Churchill trouvait que la City manquait de liquidités ; il a indexé la livre sur l’or ; les capitaux ont massivement reflué depuis Wall Street. Du coup les Américains ont disposé qu’on pourrait désormais valider une transaction avec seulement 10 % de la somme requise. Les spéculateurs y sont allés bon train… et on a abouti à la crise de 1929. A la même époque, comme les Anglais ne veulent pas « d’homme fort » sur le continent, ils jettent habilement de l’huile sur le feu des Réparations par l’Allemagne, faisant irrésistiblement monter la tension entre les deux rives du Rhin. C’est bientôt la guerre, Dunkerque et le repli britannique. Washington n’a pas de raison d’intervenir : la première guerre mondiale a été une excellente affaire qui a propulsé les States au premier rang de l’économie mondiale, notamment du fait du commerce des armes… à l’ensemble des belligérants.
Tout ça a commencé trois siècles plus tôt avec les enclosures. La gentry anglaise trouve qu’elle perd bêtement des revenus en autorisant les petits paysans à pratiquer la vaine pâture sur ses terres. Elle les leur interdit afin de les vouer aux cultures de rente. Les paysans affamés s’entassent dans des bidonvilles, main d’œuvre bientôt disponible à bas prix pour l’industrie qui commence à naître. Le beurre et l’argent du beurre. Ce temps-là s’achève.
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