Les nouvelles modalités de l’autoformation dans la société digitale
Sous la direction de : Marc Nagels et Philippe Carré
Éditions Archives contemporaines, 2016
L’étude qualitative « Apprendre par soi-même aujourd’hui » vise à renouveler les connaissances sur les pratiques d’autoformation, mais aussi à les réinterroger à la lumière de l’usage des ressources numériques. L’autoformation est ici analysée sous trois angles spécifiques : l’environnement, avec l’influence du milieu familial et professionnel ; les ressources et le rapport aux ressources numériques ou sociales mobilisées par l’autoformation ; l’approche cognitive qui met l’accent sur l’organisation cognitive de l’activité d’autoformation et les ressources individuelles d’auto-effcacité. Les résultats présentés renforcent la perspective de l’apprenant devenu particulièrement capable de diriger ses apprentissages, opportuniste dans la gestion des ressources et combinant au service de ses buts les apports des dispositifs formels et informels dans leurs formes les plus récentes.
Extrait, Pascal Cyrot, pp. 18-19
Autoformation : vers une définition renouvelée
Pour comprendre l’autoformation, il faut intégrer les deux aspects propres de cette notion. C’est, en effet, autant le fait d’apprendre par soi-même que de s’enseigner à soi-même. Cela signifie que l’autoformation intègre pleinement ces deux aspects et qu’il est impossible de faire l’économie d’un de ces deux aspects. Dit autrement, c’est autant un processus de formation que d’apprentissage. Cette combinaison de deux profils opposés au sein d’une même personne renvoie à une forme de schizophrénie formative. Métaphoriquement, l’autoformation est à la formation, ce que le cubisme est à la peinture. Comme Picasso réussit à faire rentrer deux profils dans un même portrait sur une toile en deux dimensions [Le fameux portrait de Dora Maar en est une bonne illustration], l’autodidacte ou le s’autoformant regroupe, en une seule personne, le maître et l’élève.
Par ailleurs, l’autoformation est un vocable qui donne une vision archétypique et donc simplifiée du processus de formation/d’apprentissage. De l’autre côté, l’hétéroformation est, elle aussi, un construit scientifique qui simplifie, de manière abusive, la réalité formative. En effet, les pratiques de formation/d’apprentissage se situent, en général, au croisement des deux « genres » avec une mineure et une majeure permettant son classement dans une famille ou une autre. On peut alors considérer qu’un épisode de formation (hétéroformation ou autoformation) résulte de la combinaison de la direction pédagogique (hétéro/auto), de la direction psychologique (hétéro/auto) et de la nature du dispositif (hétéro/auto). Il est alors « aisé » de scorer chacune des composantes.
Direction pédagogique hétéro 1 — 2 — 3 — 4 — 5 — 6— 7 — 8 — 9 — 10 auto
Direction psychologique hétéro 1 — 2 — 3 — 4 — 5 — 6— 7 — 8 — 9 — 10 auto
Nature du dispositif hétéro 1 — 2 — 3 — 4 — 5 — 6— 7 — 8 — 9 — 10 auto
C’est seulement lorsque l’ensemble est majoritairement orienté vers l’« auto » que l’on peut raisonnablement parler d’autoformation.
Finalement, l’autoformation peut prendre de nombreuses formes qui découlent, bien sûr, de la combinaison des composantes ci-dessus, mais également de l’objet d’apprentissage retenu, des ressources formatives utilisées (vie, supports papier, supports audio ou vidéo, supports numériques bruts ou transformés), des médiations humaines directes ou intermédiées mobilisées, de l’intensité de l’apprentissage, de la persévérance et la durée de l’épisode, de l’échec ou de la réussite de la démarche engagée, etc.
Table des matières
Introduction
Marc Nagels et Philippe Carré i
- L’ autoformation, aujourd’hui
- Autoformation et échange généralisé du savoir
- Le cadrage théorique de l’étude
- Un contexte d’apprentissage de plus en plus numérique
- L’autoformation, ce qui change
- Sept chapitres pour rendre compte des évolutions
1 Le poids du contexte familial dans les dispositions à l’autoformation
Nathalie Tingry et Christophe Jeunesse …1
- L’émergence d’une typologie d’analyse
- L’influence du contexte familial dans les pratiques d’autoformation
- Des déclencheurs extérieurs incitant à une attitude d’autoformation
- Des origines de l’autoformation inconnues, parfois perçues comme « innées »
Conclusion
2 Autoformation, bibliothèques et numérique. Les sociabilités contemporaines
Pascal Cyrot …13
- Autoformation, sociabilités et sociabilités autoformatives
- Autoformation : vers une définition renouvelée
- Méthodologie
- Problématique
- Résultats
Conclusion
3 Quelle place pour les médiathèques dans l’autoformation professionnelle ?
Frédérique Gérard …33
- Les professionnels interrogés
- La médiathèque, une influence minoritaire sur l’autoformation professionnelle
- La médiathèque pour la formation, la recherche d’emploi ou le renforcement des « connaissances » professionnelles
- Les quatre avantages de la médiathèque
- Un nouveau point de vue, celui de la cognition située
- Les trois autres environnements qui structurent l’autoformation professionnelle. L’activité professionnelle
- L’influence de la vie personnelle et de la formation
- Une médiathèque qui faciliterait l’autoformation professionnelle
- S’adapter au rythme de l’autoformation professionnelle
- Prendre en compte la spécificité des savoirs professionnels
- Soutenir l’autoformation sur le plan psychologique
4 Les dynamiques d’autoformation
Philippe Carré …45
- Les contenus : l’effet Internet
- Le déclenchement : trois scénarios
- La motivation à l’autoformation : autodéterminée et hédonique
- Le rapport à l’apprentissage
- Les dynamiques d’autoformation : entre dispositions et contextes
5 L’auto-efficacité, une ressource personnelle pour s’autoformer
Marc Nagels …65
- Auto-efficacité et confiance en soi
- L’auto-efficacité
- Les TIC et L’auto-efficacité
- Méthodologie
- Les discours sur la « confiance en soi ». l’auto-efficacité au service de son projet d’autoformation
- Une connaissance plus précise de l’auto-efficacité à s’autoformer
- La portée opérationnelle des résultats
6 Conduire son autoformation. Réajustements, choix et persévérance
Marc Nagels …81
- L’autorégulation, ressource pour une autoformation réussie
- La cognition, la métacognition et l’autorégulation
- L’autorégulation au sein d’une théorie du sujet
- Résultats
- Présentation générale des Verbatim
- Les stratégies personnelles d’autorégulation
- Résoudre les conflits entre la personnalité et les exigences sociales ou environnementales
- Les buts autorégulateurs
- Le niveau d’engagement dans l’action et les réajustements
- Préservation de l’intention d’apprendre
- La perception du développement de soi
Conclusion
7 Regards sur l’activité, ou comment descendre vers le cognitif
Sophie Pécaud et Marc Nagels …103
- Cadre théorique : la conceptualisation dans l’action 103
- Méthode de recueil et d’analyse des données 105
- Résultats. Éléments du schème 107
- Classes de situations 111
- Stratégies individuelles : trois études de cas 112
Conclusion
8 Conclusion. Les nouveaux mondes de l’autoformation
Philippe Carré et Marc Nagels …121
- Les pratiques d’autoformation : activité, dispositions, contexte social
- « Effet internet » et émergence de la formation « semi-formelle »
Annexes
- Note méthodologique
- Présentation de la population interviewée
- Protocole détaillé d’entretien
- Grille de codage des Verbatim
- Le panel des trente-six professionnels retenus
- Échelle d’auto-efficacité. Autoformation en contexte numérique
- Phase d’approfondissement, l’activité autorégulée observée
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